Galvanisé
Elèves insupportables aujourd'hui : pas cadrés, pas tenus… Un véritable tumulte dans la salle de cette école ZEP. Et comme toujours dans ces cas-là, des maîtres effacés (ou crieurs !!). J'avais 70 gamins (classes de CM2 et 1 classe de 5ème) à "tenir" pendant 1 heure. Face à une telle situation, il n'y a qu'un choix, et pas deux : je dois "les conquérir".
Alors j'ai fait une véritable performance, inventé des postures, des bons mots, des situations, des rebondissements, trouvé moultes ficelles… Et au bout du compte, ils ont été conquis, pour ne pas dire subjugués !
Ce sont ces situations extrêmes qui ont forgé mon métier de conteur.
Je suis sorti de ces séances (il y en a eu 3 d'affilée), non pas sur les rotules, mais gonflé à bloc. Dans la rue, il fallait que je me retienne pour ne pas remonter les bretelles à tous les passants.
Sur le coup de midi, je suis allé prendre le plat du jour dans un petit resto du coin. Comme le service traînait, et comme j'étais encore chaud bouillant, je me suis levé et j'ai dit à toute la salle : "Bon, tant pis, je n'irai pas travailler cet après-midi" ! Et m'adressant aux serveurs : "vous me ferez un mot d'excuses !".
Du coup, j'ai été servi aux petits soins et j'ai même eu droit au café offert ! hé, hé !
Un jour, il faudrait que je parle du pouvoir de la parole. Il est véritable, il peut même être total. Le métier de conteur est un métier de pouvoir. Il importe plus que tout d'en être conscient. Il importe tout autant d'excercer cet art que de savoir aussi s'effacer. Vive les poètes, ils le savent je crois, mieux que nul autre.